JEUX OLYMPIQUES - «Too big to fail» devrait aussi s’appliquer aux J.O.

Sotchi • Les Jeux olympiques d’hiver de Sotchi, qui vont débuter le 7 février,  font dans le pur gigantisme. Deux têtes pensantes du sport plaident pour une nouvelle réalité olympique. 

  • Beaucoup le disent: à Sotchi, Vladimir Poutine a fait dans le gigantisme. dr

    Beaucoup le disent: à Sotchi, Vladimir Poutine a fait dans le gigantisme. dr

«Sotchi est un abus de l’idée olympique, le gigantisme à bien des égards et une propagande plutôt maladroite», lance Arturo Hotz. Ce professeur émérite des sciences du sport à l’Université de Göttingen (Allemagne) est partagé sur la question du gigantisme. Car ce «romantique» marqué par ses souvenirs des JO d’hiver de 1948 à Saint-Moritz aurait été ravi par une nouvelle édition en 2022 dans les Grisons.

 

L’esprit olympique

Le problème de crédibilité des Jeux olympiques a encore pris de l’ampleur à l’occasion des Jeux de Pékin en 2008. Mais Arturo Hotz situe l’instrumentalisation des JO dès les débuts. «Il y a un consensus pour que cela ne continue pas ainsi. Mais que voulons-nous fondamentalement?»

Arturo Hotz déplore en particulier la commercialisation des Jeux. Elle est contraire à la vision de Pierre de Coubertin, qui parlait de «fête de la jeunesse» et de «printemps humain».

Notre expert est convaincu qu’une vision de l’olympisme basée sur l’éthique est incompatible avec les milliards du business. «C’est comme si on essayait de clouer un pudding au caramel sur un mur, illustre-t-il. Le CIO serait en mesure de freiner le gigantisme. Mais qui veut renoncer à tout l’argent que cela peut rapporter?» Son appel a dû en principe être entendu, puisque Arturo Hotz s’est vu attribuer pour l’ensemble de sa carrière la Coupe de l’éthique en 1998 à Lausanne, siège du comité.

 

Moins d’athlètes

Pour redimensionner les Jeux, il propose de diminuer le nombre d’athlètes. Arturo Hotz s’inspire des JO 1972 de Sapporo et de ceux de 1994 à Lillehammer. «Ce furent des Jeux plus modestes, avec moins d’athlètes, mais est-ce encore envisageable et réalisable aujourd’hui?» Et de proposer des épreuves de sélection préolympiques, qui devraient se tenir principalement dans les anciens stades olympiques, «ce qui permettrait de les utiliser de manière plus efficace».

De même, Heinz Keller, ancien directeur de l’Office fédéral du sport (OFSPO), plaide en faveur d’une réflexion en profondeur sur la dimension: «Les Jeux doivent devenir plus petits, plus durables, plus honnêtes, plus cultivés et rester irréprochables sur le plan sportif.»

 

Une nouvelle réalité

Ce qu’il faut, ce n’est pas une nouvelle utopie olympique, mais plutôt une nouvelle réalité olympique. «Too big to fail» (trop grand pour faillir), le thème clé de la politique économique et financière, doit devenir une notion centrale aussi pour les Olympiades», revendique l’ex-directeur de l’ OFSPO. Si on réussit à trouver une forme bancaire «juste», en faisant des placements plus durables, en travaillant de manière plus transparente et en développant à nouveau une culture bancaire, «alors, cela doit être facile, dans le sport, de le faire encore mieux».

Heinz Keller estime que l’honnêteté fiscale, la transparence financière ou encore le commerce équitable ne sont pas seulement un devoir pour le Comité international olympique (CIO), mais aussi pour toutes les associations internationales de sport en général.

En ce qui concerne le CIO, il n’a pas seulement à cœur d’attirer l’attention sur le rôle du commerce, mais aussi sur les germes des nationalismes. «Le CIO doit réfléchir sur sa propre influence extérieure et à l’influence du sport», plaide Heinz Keller.n

 

Cet article peut être lu dans son intégralité sur www.swissinfo.ch