S’intéresser à ce qui s’est passé à Lausanne en 1980, c’est buter indéfiniment sur deux mots: Lôzane Bouge. A croire que cette année n’a vu passer aucune autre décision importante, aucun autre événement majeur. Parlons-en, alors, de Lôzane Bouge. Le mouvement contestataire manifeste pour la première fois en juin 1980 lors de la Fête de Lausanne. Puis, entre le 27 septembre 1980 et février 1981, pas moins d’une dizaine de manifestations ont lieu en ville de Lausanne. Les revendications restent toujours les mêmes: l’ouverture d’un centre autogéré, l’affichage libre, le droit de manifester sans autorisation et la suppression du prétendu «fichier des homosexuels ».
La jeunesse d’alors conteste le futur qu’elle voit s’ouvrir devant elle. Elle refuse la course au profit et la construction de centrales nucléaires. Durant presque cinq mois, violences policières et déprédations dans les rues et sur les vitrines de commerces sont monnaie courante. Des tentatives d’occupation, notamment dans des locaux de l’EPFL, sont arrêtées par la police. La seule qui aboutira sera celle du Rôtillon, d’où les occupants seront tout de même chassés lors de la mise à disposition permanente des locaux de St-Martin pour un centre de jeunesse, décidée par la Municipalité le 29 avril 1981.
Malheureusement, le lieu fermera déjà en juillet 1982. Nous pouvons dire l’objectif sera véritablement atteint avec l’ouverture de la Dolce Vita en 1985 à la rue César-Roux. La «Dolce» restera une vraie scène de rock alternative dans la capitale vaudoise jusqu’en 1999. Aujourd’hui encore, même si le lieu et les circonstances ne sont plus pareils, la vocation du lieu d’être un centre autonome continue de vivre au travers de l’Espace Autogéré, au même endroit que se trouvait la Dolce Vita.
Nouvelle vague en cinéma
C’est cette même année que Yves Yersin et Jean-Luc Godard sont mandatés par la ville de Lausanne afin de vanter les vertus touristiques de la cité. L’idée étant de les projeter en 1981 à l’occasion de la commémoration de l’unification médiévale de ville haute et basse, ainsi que pour l’ouverture des nouveaux locaux de la Cinémathèque Suisse. Et pourtant, ces deux films se situent bien loin du teaser touristique classique. C’était le risque à prendre pour la Municipalité en engageant deux auteurs phare de la Nouvelle Vague cinématographique en Suisse. Et malgré la motion de 11 élus, fin 1981, qui attaque les productions jugées non conformes aux objectifs posés, ces deux films tournés en 1980 seront sélectionnés pour être présentés au festival de Cannes en 1982.
L’année 1980 marque aussi la mise en exploitation partielle du CHUV. De renommée aujourd’hui internationale, le bâtiment n’enchante pourtant pas lors de sa construction, accusé de défigurer la crête de la Ville, et de faire de l’ombre à la cathédrale. «C’est dégueulasse. Mais c’est construit. A part s’il y a une erreur de tir de bombardement… et encore je crois que les dalles sont assez solides.» (Source: RTS) Dire que les réactions face au nouveau complexe hospitalier sont dubitatives serait un euphémisme.
Entre revendications sociales de la jeunesse et refus de la modernité sous prétexte de gâchis du paysage, quelque chose a-t-il vraiment changé en 37 ans? En tout cas, depuis 1980, Lausanne Cités est là pour vous en informer… au cas où il se passerait quelque chose de nouveau !