Avant de se faire prendre en photo, il enlève prestement sa paire de lunettes. On peut être Maître du judo, Japonais tout en demeurant coquet et en affichant une belle sérénité: «On est éduqué pour ne pas montrer ce qu’on a ou ce qu’on vit à l’intérieur de soi. Sur un tatami, la peur doit rester en nous. Il ne faut pas la diffuser», dit-il avec l’habit du judoka et une ceinture rouge et blanc réservée au 6e, 7e et 8e dan, un grade difficile à acquérir.
Un enfant de Kobé
Né à Kobé, la grande ville portuaire japonaise, Hiroshi Katanashi avoue avoir été un bon élève. «J’ai fini mes études. Je suis professeur d’éducation physique.» Avant que son cœur ne batte pour le judo, c’est le baseball qui l’a intéressé en premier. Mais le destin veillait. «Où j’étudiais, le fils de mon futur professeur de judo m’a invité à suivre un cours d’initiation. J’y suis allé. Je n’ai plus jamais quitté les tatamis», se souvient-il en ajoutant avec le sourire: «Pourtant, j’étais vraiment bon au baseball.»
En raison d’une douleur persistante à un coude, la carrière d’Hiroshi Katanishi, comme compétiteur, n’a duré que 8 ans. «Elle m’a permis de devenir quart de finaliste au championnat du Japon des moins de 20 ans.» Puis il part pour la France où, de 1974 à 1976, il devient entraîneur de l’équipe tricolore. Avant de rejoindre Lausanne pour y être l’entraîneur du Judo Kwai, club né en 1953, qui n’a connu que des entraîneurs japonais. Il ne devait y rester que quelques mois. Cette année, cela fait tout juste 38 ans qu’il y prodigue son enseignement.
Une distinction suprême
Récemment, le Kodokan de Tokyo, la Mecque du judo, qui suit ses meilleurs représentants à travers le monde, l’a élevé au grade de 8e dan, un fait rarissime. «En Suisse, nous ne sommes que cinq!» Son implication permanente, sa science au niveau de l’enseignement, les résultats obtenus par ses élèves sont quelques-uns des critères qui ont été décisifs pour obtenir ce haut grade.
«Si je suis un guide spirituel? Mes élèves doivent avoir leurs propres initiatives, devenir autonomes. Je les pousse à ça. Je leur demande d’apprendre, puis de cultiver la maîtrise de soi, c’est si important dans la vie». On l’appelle Maître, terme qui fait partie du respect et de la hiérarchie. Des plus jeunes lui disent Monsieur et des parents, Monsieur Hiroshi. Sa devise: un minimum de force pour un maximum d’efficacité. Il enseigne comme il a combattu: avec ses émotions. «Le judo est une école de la vie. Tout seul, on ne peut rien faire. Il faut partager, c’est ce qu’a enseigné toute sa vie mon Maître Jigoro Kano, fondateur du judo en 1882. »