Il y a mille choses, comme le service de la bagnole ou la visite pré-pascale à tante Agathe, qu'on devrait faire plus souvent dans la vie; avant qu'il ne soit trop tard. Et il y a un truc qu'on ne fera jamais assez: se mettre à la place des autres. Si si, ça irait vachement mieux de par le monde en capilotade si, un poil moins rarement que de coutume, les uns avaient l'idée ne serait-ce que d'imaginer ce qui peut se tramer dans le cabochon des autres, et vice et versa en toute souplesse. Juste pour voir ce que ça donne.Savoir se mettre à la place des autres, c'est l'assurance d'une meilleure compréhension mutuelle, le socle d'une harmonie supérieure voire, puisqu'on parle de sport, la clé du succès. Or, s'il existe un spécimen expert dans l'art d'enfiler le costume d'autrui, une espèce maîtresse dans l'exercice de la procuration émotionnelle sur sofa, c'est bien nous, les téléphages sportivores du week-end - quand ce n'est pas la semaine. Se mettre à la place des autres, à moins de céder aux avantages de la sieste, on n'a que ça à faire.
Epopée cathodique
Vibrer aux exploits de ceux qui les réussissent. Becqueter au vol les miettes dérisoires du triomphe éternel, titiller la gloire certes de très loin, ou alors être frappé de si près par la cruelle désillusion du perdant déconfit. Du rire au larme, pour le meilleur et pour le pire, on se met à la place des autres.Dimanche, il y avait le 50 km classique des Mondiaux de ski de fond en direct - en direct ou en différé, tu parles si on s'en cogne; le fond, ils devraient surtout le passer en accéléré. Mais l'avantage d'un 50 km classique, c'est que ça donne à réfléchir - 2h10 pour les meilleurs. Au comble de l'effort, le téléphage se retrouve face à lui-même ce qui lui donne envie, selon un savant système d'auto-défense, de se mettre à la place des autres - vous suivez? Le fond, pratique injustement snobée par les prime-time de CNN et BBC, c'est le terrain idéal à la méditation, à la compassion, à l'analyse fine de ce qui nous entoure. Le fond, c'est l'écran total de nos projections diverses.
50 km classique
D'ailleurs, pourquoi ces jeunes gens a priori en pleine santé s'adonnent-ils à une discipline aussi peu riante, qui consiste à pousser fort et longtemps avec les mélèzes - et nous - pour seuls témoins? Et quel fut le sentiment de Dario Cologna, médaillé d'argent dudit 50 km classique, lorsqu'il apprit à l'arrivée que la population grisonne avait rejeté le projet des JO d'hiver 2022? Comment dit-on, en romanche, «un raffut pareil, sans compter les retombées du découvert, non merci très peu pour nous»? Et Dennis Rodman, star du basket américain, à quoi pensait-il au moment de faire copain-copain avec le CEO nord-coréen Kim Jong-Un?Se mettre à la place des autres, tirer le meilleur d'un groupe plutôt que le tétaniser... Que se passe-t-il entre les deux oreilles de Christian Constantin lorsqu'il licencie un entraîneur? Et lui, se met-il des fois à la place des autres? On ne saurait trop lui conseiller, juste une fois pour voir, de se poser devant un 50 km classique.