Pour connaître le frisson si particulier de la rentrée, fascinant mélange d'angoisse et d'excitation, il faut avoir eu des vacances. Le sport, lui, ne prend jamais de vacances; par peur du vide. Avec la manne générée, il y aurait pourtant les moyens pour s'en offrir de belles, tirer la prise, refroidir les feux de la rampe, mais non. Le nez dans le guidon, un oeil sur le chronomètre l'autre dans le tiroir-caisse, balle au pied ou bille en tête...Le sport, infatigable machine à émotions, ne s'arrête jamais, ni août ni juillet. Il y a toujours un truc à se mettre sous la dent, en direct ou différé.
Pas de vacances
Le sport, on a trop besoin de lui, surtout en vacances - faut bien les remplir. Alors quand l'ouvrier footballeur débranche huit jours avec sa douce dans un endroit de leur choix, pourvu qu'il y ait une place pour le yacht et des commodités pour les paparazzi, la machine continue à turbiner. Transferts, rumeurs, contre-bruits, préparation, budget grevé par la crise ou boosté par le potassium. Photos volées au bord de la piscine. Dans cet univers-là, à lui tout seul, un jeune Gallois doué de ses pieds donne aux gazettes de quoi causer tout l'été.Pas des vacances... Un agenda de ministre au contraire, avec ses passages obligés. Dans la foulée de Roland-Garros, Wimbledon. Et puis des semaines à se demander si Roger Federer est tout à fait cuit. De bouillon en déconvenue, le Bâlois fredonne le Chant du Cygne tout en rêvant de gueuler à la face du monde que oui, il peut encore nous faire le coup du phénix. Il nous donne bien du souci, «Unser Roger».Heureusement, pour se changer les idées, il y a le Tour de France, fidèle au poste. Cette année, c'était la 100e édition du renouveau, vive la Corse, vive les Pyrénées, vive le vélo. Dans l'encombrante armure du vainqueur, Christopher Froome, un Anglais du Kenya dont le nom, à condition de le dire deux fois de suite, évoque déjà le ronronnement de la mobylette. Et puis toujours la vilaine question, à la lumière du palmarès: cette pouliche-là appartient-elle à la famille des purs-sangs?
Un nouveau must
Même en vacances, on peut nourrir de sales pensées. Ce ne sont pas les Mondiaux d'athlétisme, décimés par les suspensions et autres absences plus ou moins louches, qui nous ont fait changé d'avis. M'enfin, le spectacle avait rendez-vous avec l'audience et Usain Bolt a régalé.Quoi encore? Natation, cheval, VTT, le foot romand qui fait plouf, Sierre-Zinal, le hockey suisse qui aiguise ses lames, la F1 qui répète ses gommes, des Bernois qui s'empoignent dans la sciure... Quel été! Le sport, usine à émotions, industrie omniprésente qui jamais ne souffle. Même les sauteurs à skis font ça sur l'herbe.Bref, avant la rentrée, c'était les vacances. Le sport, lui, a enchaîné, sublime poème aux ressources infinies. Mi-août, le calendrier a même accouché d'un nouveau must: les Mondiaux de biathlon en char d'assaut, sic. L'idée est venue de Sergueï Choïgu, ministre russe de la Défense. Le char rouge, plus puissant dans les lignes droites et meilleur dans les exercices de tir, a devancé - sans surprise - le char bleu (Kazakhstan), le jaune (Bélarus) et le vert (Arménie).Officiellement, et on priera Pierre de Coubertin de cesser sa lecture ici, l'épreuve visait à «vérifier le niveau de préparation au combat et asseoir le prestige des forces armées russes». L'événement est appelé à se développer. On espère que bientôt, il sera télévisé par chez nous. Mais en attendant, il y en a quand même qui feraient mieux de se reposer un peu l'été... Ça nous ferait des vacances.