EXPOSITION • Sur le châssis, véritable squelette de bois, est étirée une peau, étoffe de lin encaustiquée de blanc. Leah Linh la recouvre inlassablement de feuilles d’or. Tel l’épiderme, ces feuilles s’étirent, se fripent, se rident et se colorent.
Cette nouvelle peau ne trouvera ses limites que lorsque son pinceau en dessinera les contours. La feuille d’or, si fine et fragile, au moindre mouvement brusque de la main ou du pinceau qui la pose sur la toile, se boursoufle, se déchire ou même s’effrite. Elle laisse ainsi transparaÎtre la couche préparatoire d’un rouge carmin. Une blessure naît du hasard à la surface de l’œuvre, la chair transparaÎt.
Déformation et désarticulation
Leah Linh fait aussi surgir veines et artères qui marbrent de bleu et de rouge la surface dorée du tableau, sans jamais chercher à approcher une vérité anatomique. Au contraire, l’artiste pousse les corps vers la déformation et la désarticulation, comme le faisait, un siècle plus tôt l’un de ses modèles, le peintre autrichien Egon Schiele.
Les corps de Leah Linh se tordent autant sous l’effet de douleurs accumulées que de sentiments passionnés. L’or, de ses éclats métalliques vient illuminer la fragilité de notre chair tout comme celle de nos émotions les plus profondes. Ces vibrations intenses de l’enveloppe ou de l’âme, transcrites sur des toiles de grand format, s’imposent à nous, au point même d’empêcher notre regard de s’en détourner.
Message symbolique
D’un trait sur fond or, les œuvres que Leah Linh crée attrapent la lumière pour interroger l’obscurité́. Les limites de la toile permettent aux sensations et aux émotions transmises d’être contenues dans un espace défini.
Celles-ci seront scellées d’un rouge carmin aux caractères occidentaux et asiatiques qui fusionnent avec détermination les deux cultures opposées, dont Leah Linh est issue. Chacun de ses coups de pinceau compose un message symbolique puissant.
«Quand l’or devient peau», Leah Linh, Espace DémART, Lausanne-Flon, jusqu’au 13 juin.