Cette nouvelle version de l’homme-chauve-souris pouvait interroger. N’était-ce pas celle de trop? Christopher Nolan n’avait-il pas fait le tour du sujet? Pourrait-on faire mieux que «The Dark Knight»? Robert Pattinson n’était-il pas un mauvais choix? Hollywood n’en a pas un peu marre de refaire sans arrêt les mêmes films? Le réalisateur Matt Reeves balaie tous les doutes dans les dix premières minutes du film, en proposant une variation radicale, amère, âpre et sombre, bien loin du divertissement classique des grands cirques cinématographiques de super-héros. Du coup, «The Batman» est bien plus un prozac movie qu’un pop-corn movie, et il faut avoir le moral bien accroché pour ne pas sombrer dans la noirceur contagieuse du film. Visuellement très fidèle à l’esprit du comic, notamment dans ses variations les plus récentes, le rendu est graphiquement splendide et les personnages culte comme Catwoman, Le Pingouin, ainsi que le méchant The Riddler, joué par un terrifiant Paul Dano, sont au rendez-vous. Mais plus qu’un film de super-héros, Matt Reeves livre un grand, très grand film noir, épais et poisseux, au propos politique un poil grossier (le réchauffé «tous pourris») mais au pessimisme d’actualité. L’occasion pour nous de saisir à quel point le Batman est une figure de la pop culture, si intense qu’elle ne s’épuise jamais au fil de ses relectures.