Le journalisme est un métier de professionnels qui agit dans un rôle de service public.
Lausanne Cités: Selon-vous la crise du coronavirus profite-t-elle aux médias dits «traditionnels»?
Philippe Amez-Droz: Oui. Elle est vérifiable de façon factuelle. Le besoin d’information augmente et on observe une hausse des audiences et de la fréquentation des journaux. Mais ça n’est que temporaire. Cela n’empêchera pas un élément d’ordre économique d’influer: les médias utiles vont être impactés par les baisses de revenu et le manque de ressources. La presse locale va l’être particulièrement, car elle est privée de sa vie associative et culturelle. Sans retour à la normale rapidement, les titres locaux risquent ainsi de se retrouver face à une pénurie de sujets.
Quelle solution pour ces titres-là?
Je sens bien qu’il y a une certaine résistance, même au niveau fédéral, de venir en aide à la presse écrite imprimée. Certains acteurs doivent penser que la crise finira par faire le ménage: ceux qui doivent rester resteront et ceux qui ne le peuvent pas disparaîtront. Le vrai soutien, s’il doit y en avoir un, viendra des cantons qui ne voudront pas voir disparaître leurs journaux locaux et régionaux.
Y aura-t-il selon vous d’autres difficultés rencontrées ?
Aujourd’hui, les rédactions travaillent avec des équipes restreintes, mais aussi avec des ressources largement réduites. Une question qui se pose est de savoir si ce mode de fonctionnement influencera la reprise des activités après le confinement. Par ailleurs, d’autres groupes, comme Ringier ou Tamedia, profiteront de leur taille mais les conséquences économiques de la crise sur des grands groupes pourraient amener à une recomposition du paysage médiatique. Par exemple, une fusion du 24 heures avec la Tribune de Genève. Ce sont des situations probables, comme on en avait déjà connues récemment ; la fusion entre L’Impartial et L’Express, pour devenir la plateforme numérique ArcInfo.ch, est un exemple.
Comment pensez-vous que l’on puisse aider la presse locale ?
Le journalisme est un métier de professionnels qui agit dans un rôle de service public. Il est primordial que la presse privée puisse tirer profit de l’importance de ce service public, à la hauteur du Covid-19, pour obtenir une aide directe pour les médias locaux, une forme de redevance. Il n’y a pas que la SSR qui doit pouvoir tirer profit de cette crise.