Les éléments de langage, ces mots clés que les communicants ou les partis transmettent à leurs troupes pour les répéter à l’envi dans les médias, sont aux politiques ce que le braiement est à l’âne: la répétition ad nauseam et à tue-tête des mêmes sons, en espérant que le public, de guerre lasse et sous le joug du matraquage, finisse par craquer et se rallier à ce qu’on lui dit.
A Lausanne, il en est un qui force l’admiration tant il est quasiment érigé au rang de mantra: «apaisé», un vocable systématiquement évoqué à gauche dès lors que l’on parle de mobilité. Dernier exemple en date, David Raedler, président de l’ATE Vaud qui au micro de nos confrères de LFM prônait une fois de plus la généralisation du 30 km/h pour évidemment, «apaiser» Lausanne. Tout comme la suppression des places de parc, l’élargissement à l’infini des pistes cyclables, de grandes mesures de coexistence pacifique, également destinés à «apaiser» la ville qui chacun s’en souvient s’apparentait dans le passé à un véritable champ de bataille urbain. Etonnamment, cette volonté d’apaisement, digne d’un Prix Nobel de la Paix tout de même, suscite un incompréhensible écho chez les commerçants, automobilistes, personnes handicapées, et autres piétons décidément très belliqueux et insensibles à cette démarche de pacification.
Le procédé n’est pas nouveau. La droite a elle-même usé et abusé du mot «réforme» pour tenter de faire passer la pilule de son obsession de démanter les acquis sociaux. Mais dans le cas de «l’apaisement», la démarche prend en plus un parfum de pompier-pyromane qui consiste à déclamer une volonté, d’apaiser tout en créant les conditions d’un mécontentement bien supérieur à celui qui prévalait. Une rhétorique qui n’est pas sans rappeler celle d’un certain Poutine qui affirmait «pacifier» l’Ukraine en l’envahissant…