En Suisse, une femme peut interrompre une grossesse non souhaitée dans les douze premières semaines depuis 2002. Cette année-là, le peuple accepte le régime dit «des délais» à 72%. L’interruption volontaire de grossesse (IVG) est alors décriminalisée, et les frais en sont pris en charge par l’assurance-maladie. Depuis son introduction, on n’observe pas d’augmentation massive des IVG; au contraire, la Suisse a un taux d’avortement parmi les plus bas du monde. En février prochain, nous devrons à nouveau voter sur cette question puisqu’une initiative lancée par des milieux fondamentalistes s’attaque au libre choix en exigeant que le remboursement d’une interruption de grossesse soit désormais à la charge des individus. Cette proposition est tout simplement inacceptable et dangereuse. En prétendant fallacieusement rechercher une baisse des coûts de la santé, les initiants contestent en réalité la volonté populaire de 2002. Des estimations montrent en effet que le coût annuel des avortements oscille entre 7 et 10 millions de francs, soit environ 0,03% des dépenses de l’assurance-maladie. Ce n’est donc pas cette mesure qui va diminuer les coûts globaux de la santé.
L’initiative est par ailleurs insoutenable du point de vue de l’inégalité de traitement qu’elle induit: les femmes aisées pourraient continuer à interrompre leur grossesse alors que les plus pauvres devraient renoncer à cette possibilité ou recourir à d’autres méthodes. Les suites d’opérations moins chères mais aussi moins sûres seraient dévastatrices tant sur le plan humain que sur celui des coûts. Aucune punition, aucune restriction n’a jamais fait diminuer le nombre d’avortements. Au contraire, c’est bien dans la prévention qu’il convient d’investir. Le droit pour les femmes et les couples de décider librement et en toute responsabilité du nombre de leurs enfants inclut le droit à l’avortement légal et sûr. Le 9 février, refusons de porter atteinte à ce droit inaliénable.