«La rando à ski favorise une ambiance super conviviale» Paula Martin, biologiste lausannoise et mordue de ski de rando
Depuis une dizaine d’années, le «ski de rando» fait de plus en plus d’adeptes. La crise du Covid a boosté cette tendance et Lausanne n’y fait pas exception. Riche de 3563 membres, l’énorme section locale du club alpin suisse (CAS) a vu pas moins de 209 nouveaux membres rejoindre ses rangs l’an dernier. «La plupart sont des trentenaires et des quadras souvent issus des classes moyennes et classes moyennes supérieures, relève Cyril Galland, chef de course au CAS de Lausanne. Nos sorties d’initiation du week-end sont souvent toutes pleines longtemps à l’avance même si nous en proposons chaque année davantage.»
Jadis baptisé «ski de printemps» car on ne s’y adonnait alors quasiment qu’à cette époque pour prolonger sa saison, la «peau de phoque» est une pratique qui ne se cantonne plus depuis belle lurette aux seuls montagnards aguerris. Nos sociétés postmodernes aseptisées, où le moindre risque est traqué et assuré, laisse beaucoup de gens frustrés et l’aventurier ou le naturaliste qui sommeillent en eux réclame leurs dûs. «Le ski de randonnée le leur donne loin des pistes bondées même si certaines randonnées classiques, à l’image du Pic Chaussy deviennent du coup surfréquentées parfois», relève Edgard Oberson. En cette saison, le guide de montagne ne chôme pas. Son agenda est 100% plein jusqu’à la fin mars. Il constate même un manque de professionnels pour accueillir la demande.
Toujours un sport risqué
En effet, rappelons, que le ski de randonnée gagne à être pratiqué avec des personnes expérimentées. Cela reste un sport à risques, qui outre des compétences techniques et physiques de ski, exige un minimum de connaissances nivologiques. L’hiver passé, l’Institut pour l’étude de la neige et des avalanches (SLF) de Davos enregistrait en effet 15 morts sous des avalanches.... Malgré cela, le nombre de pratiquants augmente imperturbablement depuis presque quinze ans. D’après l’Observatoire suisse du sport, 1,5% des Suisses pratiquaient la rando à ski en 2014 contre 3,4% en 2020! Heureusement, les «randos parcs» sécurisés fleurissant un peu partout ces dernières années dans les stations permettent de s’initier sans prendre de risque par exemple à Morgins ou Crans-Montana.
Un matériel qui favorise la popularisation
Lausanne occupe un positionnement central très favorable à la peau de phoque. «Depuis la capitale vaudoise, on peut déjà aller randonner dans la région des Paccots ou sur les hauts de Montreux à une demi-heure de voiture et en 15 minutes de plus dans les Préalpes vaudoises ou gruériennes et dans le Chablais valaisan», récapitule Edgard Oberson.
David Poletti, responsable adjoint de Bächli Sports de montagne Lausanne, relève de son côté que «cette popularisation grandissante doit beaucoup au matériel». Son magasin a vendu 25% de plus de ski de randonnée en 2022 qu’en 2021. L’incessante modernisation des skis, désormais tous «carvés» à divers degrés et souvent dotés de «rocker» permettant de rester plus facilement en surface plutôt que de s’enfoncer sous la neige, donnent à des skieurs techniquement moyens la capacité de godiller dans la poudreuse là où, jadis, seuls les bons glisseurs pouvaient évoluer.
Liberté et évasion
L’allégement du matériel, grâce notamment à la fibre de carbone, facilite aussi les ascensions et en augmente la vitesse ce qu’aiment les sportifs d’endurance, portion non négligeable des nouveaux pratiquants, à adopter cette discipline en rêvant de Patrouille des glaciers.
La Lausannoise Paula Martin, biologiste de 28 ans, appartient plutôt à la catégorie majoritaire des néophytes cherchant surtout «la liberté, la solitude et l’évasion». L’Espagnole s’est mise à la rando à ski avec une vieille paire à son arrivée en Suisse voici deux ans et depuis, tous ses week-ends d’hiver y passent.
«Beaucoup de gens pratiquaient autour de moi et ça m’a donné envie. Même si c’est parfois un peu dur physiquement, j’adore. La rando à ski est magique et favorise une ambiance super conviviale.»