«On ne va pas fermer la moitié des crèches de la ville pour faire des économies!»
Lausanne Cités: Les diverses crises (climatique, sanitaire et ukrainienne) que nous traversons pèsent pour 58 millions de francs dans votre budget 2023. Vous avez dû réduire certaines dépenses?
Florence Germond: Ce n’est pas dans une période difficile, comme celle que nous vivons, qu’il faut tirer le frein à main. Les collectivités publiques doivent, au contraire dans ces moments, soutenir la population et maintenir leurs dépenses et investissements, c’est leur rôle.
La superposition de ces crises ne provoque donc pas un casse-tête budgétaire?
Oui, forcément. Nous avons ces dernières années lancé plusieurs programmes d’amélioration des finances à hauteur de 75 millions. Notre objectif n’a jamais été de couper à la hache dans notre budget. Il faut davantage travailler sur le long terme avec des mesures progressives. La Ville de Lausanne est un gros bateau qui change lentement de cap. On ne va pas fermer la moitié des crèches de la ville pour faire des économies!
Qu’avez-vous prévu pour les Lausannois qui peinent à boucler leurs fins de mois à cause de l’inflation galopante?
La Ville étudie notamment le déploiement d’un nouveau plan d’action pour permettre des économies d’énergie aux locataires. Mais nous n’avons pas attendu la présentation du budget 2023 pour agir. Nous avons notamment introduit des bons pour les transports publics pour les seniors et les enfants. Pour une famille avec deux jeunes, l’aide représente environ 400.-/an, pour un couple de retraité, plus de 500.- ou même jusqu’à 1200.-/an s’ils sont bénéficiaires des PC AVS/AI.
Vous pourriez passer à la vitesse supérieure si la situation devait empirer?
Durant la pandémie, nous avons fait preuve de beaucoup d’agilité en soutenant les commerçants et la population avec l’octroi des bons, par exemple. En 2023, nous pourrons aussi faire preuve d’agilité pour réagir si la conjoncture l’exige.
Malgré un déficit annoncé de 81,2 millions, les investissements en faveur du climat seront massifs avec, par exemple, 110 millions de francs dévolus à la rénovation énergétique des bâtiments, cela ne pouvait vraiment pas attendre?
Nous devons fortement accélérer la transition énergétique et la rénovation des bâtiments est un axe important. En 2022, nous avions planifié d’y consacrer 21 millions de francs et ce montant a été augmenté à 110 millions désormais, c’est un pas de géant en la matière.
A droite, certains vous reprochent de laisser la dette s’envoler. Avec un déficit de 81,2 millions prévu l’an prochain, le PLR et l’UDC vont à nouveau vous tomber dessus…
Oui et c’est le jeu politique, j’y suis habituée. Depuis mon arrivée en 2011 à la Municipalité, les comptes ont toujours été proches de l’équilibre (hors recapitalisation de la caisse de pension). Il est donc faux de prétendre que la dette s’est envolée. Nous l’avons au contraire réduite de 160 millions. Ceci grâce à des programmes d’amélioration des finances. Les partis de droite peuvent toujours critiquer, ils ne proposent aucune solution pour améliorer la santé financière de la Ville.
Vous avez souvent reproché au Canton de faire preuve de pingrerie en reportant certaines charges sur les communes. Valérie Dittli a remplacé Pascal Broulis aux finances, vous lui faites le même reproche?
J’ai été déçue de voir que Valérie Dittli a fait un budget 2023 qui est la copie conforme de ceux de Pascal Broulis s’agissant du manque de respect envers les communes vaudoises. A mon avis, il serait utile qu’elle s’en émancipe lors de son prochain budget. Une fois encore, l’Etat a pris des décisions qui impactent les communes alors que le déséquilibre est crasse. Leur dette a atteint sept milliards alors que le Canton n’est plus endetté et a pour plus de quatre milliards de liquidités dans son bilan. Cela devient indécent, alors que les Communes avaient demandé des négociations. Les décisions du Conseil d’Etat représentent une perte de six millions de francs pour la Ville et plus de 30 millions pour les communes. Il est urgent que le Canton reprenne à son compte une partie des charges des communes.
A la tête des finances lausannoises, vous avez dû affronter le casse-tête du Covid, maintenant celui de l’inflation, vous n’êtes pas un peu fatiguée de voir les mauvaises nouvelles se succéder?
Comme l’ensemble des Lausannois, j’ai parfois ressenti du découragement en voyant les crises s’enchaîner à une telle vitesse mais il faut tenir bon…