«Le transport lacustre est loin d’avoir accompli tout son potentiel»
Andreas Bergmann, directeur général de la CGN
Clairement, il n’y a pas que la voiture. Le transport fluvial et lacustre entend lui aussi prendre le tournant de la transition énergétique. L’Office fédéral des transports a ainsi lancé une étude de faisabilité, dont les résultats sont attendus pour la fin de l’année, afin de «concevoir un bateau de transport public innovant», innovant voulant dire ici propre et écolo.
Impliquée dans cette étude, la CGN n’a pas attendu Berne pour avancer. D’ores et déjà, elle a commandé deux bateaux à propulsion hybride électrique/diesel, des navires en cours de construction et livrables en 2022 et 2023, le premier bateau assurant la liaison Lausanne Evian, le second reliant Lausanne et Thonon ainsi que Nyon et Yvoire.
Réduire l’empreinte écologique
«Notre ambition est de réduire l’ensemble de notre empreinte écologique, explique Andreas Bergmann, patron de la Compagnie générale de navigation. En 150 ans d’activité, nous avons acquis une grande sensibilité au bassin lémanique et il est évidemment de notre intérêt de le préserver, d’autant que le transport public lacustre connaît une très grande croissance depuis 10 ans.
Actuellement, la flotte de la CGN émet 11760 tonnes de CO2 par an, mais vise à moyen/long terme la neutralité carbone, une stratégie dans laquelle s’inscrit la mise en service des deux futurs bateaux hybrides, assemblés à Ouchy alors que les composants seront acheminés par la mer depuis les chantiers navals de Gdansk en Pologne jusqu’à Bâle, puis par la route jusqu’à Lausanne.
Label Navi Express
Identiques, les deux navires - dont le nom reste à trouver - seront exploités selon le label Navi Express. Dès la mise en service du premier, la CGN doublera le nombre de places assises en heures de pointe entre Lausanne et Evian avec une fréquence à 45 minutes contre 1 heure 20 aujourd’hui, sans compter un temps d’embarquement et de débarquement réduit à 3 minutes. Avec en sus, une consommation énergétique réduite de 40 % par rapport aux unités actuelles.
«On estime la part de marché actuelle de la CGN à 25%, évalue Andreas Bergmann, ce qui veut dire que les 3/4 des frontaliers viennent actuellement en voiture. C’est dire s’il y a encore un grand potentiel en termes de réduction d’émission de CO2. Il suffit de regarder Oslo, Istanbul, ou San Francisco pour se rendre compte du potentiel de transport lacustre».
Fabriquées à Yverdon, les batteries qui équiperont les deux navires seront en lithium-ion et réparties en 4 bancs d’une capacité totale stockée de 600 kWh. Rechargées à quai pendant la nuit et durant la traversée lorsque les moteurs diesel seront en marche, elles permettront de faire fonctionner le navire en mode entièrement électrique à proximité des côtes afin d’éliminer émissions nocives et nuisances sonores.
Le choix d’une propulsion hybride électricité/diesel s’explique quant à lui par les contraintes d’exploitation des liaisons lacustres.
Adaptables dans le futur
«Avec des navires fonctionnant de 5 heures du matin à 23 heures, des cadences accélérées et un retournement dans les gares lacustres inférieur à 5 minutes, il était limite d’avoir recours à des batteries pures rappelle Andreas Bergmann. Notre choix s’est donc porté sur du mixte diesel-électrique, car il a fait ses preuves dans des contextes similaires, avec une technologie mature qui permettra d’assurer un service fiable». Bonne nouvelle cependant pour les puristes: les bateaux actuellement en cours de construction sont compatibles avec les technologies futures et pourront être dotés de propulsion zéro émission dès qu’une technologie fiable sera disponible.