Il est assurément tentant pour bien des citoyens de soutenir l'initiative Minder, qui veut limiter les rémunérations pharaoniques servies à certains dirigeants de sociétés. Mais il n'est pas interdit d'aller au-delà de la posture indignée pour se demander si les moyens proposés sont adéquats.Ces mesures sont de deux ordres. D'abord, le texte renforce les pouvoirs de l'assemblée générale. On s'illusionne, pourtant, en imaginant que la multitude peu organisée des actionnaires soit véritablement apte à inculquer le sens de la mesure aux dirigeants.La meilleure preuve en est donnée par le fait que les sociétés cotées ont l'obligation, depuis 2007, de faire connaître les montants des rémunérations dans l'annexe au bilan. Les actionnaires ont donc déjà tout en main pour «faire le ménage» s'ils le souhaitent: refus des comptes annuels ou de la décharge au conseil d'administration, révocation des membres du conseil, action en restitution, voire en responsabilité. Qu'en font-ils? Il faut dissiper les malentendus qui circulent trop souvent sur le rôle et la fonction des actionnaires.La seconde catégorie des propositions de M. Minder consiste à interdire certaines pratiques (parachutes dorés, primes à l'engagement) et en rendre d'autres obligatoires (le vote des caisses de pensions), le tout sous menace de sanctions pénales. Si certains versements sont il est vrai fort déplaisants, on ne voit pourtant pas en quoi l'intérêt public serait assez touché pour en menacer les auteurs de trois ans de prison. Quant au vote obligatoire des caisses de pensions, leurs responsables ne peuvent qu'être consternés de se retrouver passibles des geôles en cas de décision qui n'irait pas «dans l'intérêt des assurés».Si populaire que soit la cause défendue par M. Minder, son initiative mérite d'être rejetée. Il n'en résultera pas le statu quo puisqu'un contre-projet entrera alors en vigueur. Sans être parfait loin s'en faut, au moins évite-t-il les errements les plus manifestes de cette initiative mal ajustée.